Comment une petite erreur a mené à la création d’un événement majeur en sommellerie à Montréal.
Par Guy Bertrand
« Dans la vingtaine de candidats qui sont ici, je peux vous garantir que le prochain meilleur sommelier du monde est dans la salle! » Ces paroles sont d’Élyse Lambert, 5e sommelière de la planète en 2016. L’événement auquel elle fait référence est Somm360, une idée folle née dans l’esprit d’un entrepreneur de Québec, Vincent Lafortune.
« Je me préparais pour une compétition en sommellerie. J’ai gagné le championnat de l’école puis je suis allé au concours provincial où j’ai été disqualifié pour un problème de chronométrage. Je suis sorti de là un peu découragé, se souvient le promoteur. (…) J’ai décidé d’en faire quelque chose de positif. »
Il a donc créé un programme pour assurer une formation continue en sommellerie au Québec un plus de créer un réseau d’accompagnement et de soutien pour aider les jeunes sommeliers qui aspirent à l’excellence.

BOOT CAMP
Somm360 a d’abord été un congrès de trois jours qui a regroupé 300 personnes de l’industrie du vin dans le Vieux-Port. Mais c’est aussi et surtout le fameux Boot Camp, où les meilleurs sommeliers de la planète viennent enrichir leurs connaissances auprès de quelques unes des plus grosses pointures de l’industrie, dont François Chartier, premier Canadien à mériter le grand Prix Sopexa du meilleur sommelier en vins et spiritueux de France.
« Pour les sommeliers, pour moi, pour les étudiants en sommellerie et les sommeliers professionnels, il fallait être ici! » nous dit le créateur d’harmonies.
Pour lui qui a passé toutes les étapes de préparation pour les grands concours, ce qui est important est l’environnement de travail qu’on procure aux candidats ici. « Ils ont une chance de passer une semaine ensemble avec les meilleurs et d’être dirigés par les meilleurs. Il y a un comité alentour de ça. J’en fais partie, Véronique Rivest (2e sommelière au monde en 2013) aussi; il y a Alain Bélanger (3e sommelier du monde en 2000), Élyse Lambert… Un comité incroyable pour venir leurs enseigner et les amener ailleurs. (…) D’avoir à passer comme ça une semaine dans ce bouillon de culture, ça va leur apporter énormément, j’en suis convaincu. »

Mais c’est aussi une belle occasion de se perfectionner nous explique Danielle Dupont, sommelière du Baccara, au Casino du Lac-Leamy: « C’est une excellente opportunité de faire du réseautage, C’est rare qu’on puisse se ramasser tout le monde ensemble, d’une vingtaine de pays et de pouvoir échanger, se rencontrer, voir les différentes cultures… On est chanceux d’être ici aujourd’hui! »
LES AMBASSADEURS
Pour en arriver à un tel résultat, il a bien sûr fallu se relever les manches sérieusement. Vincent Lafortune a mis toutes les chances de son côté en recrutant 16 ambassadeurs pour mousser l’événement autour du globe. Nos grands noms québécois, bien entendu, mais aussi des stars internationales du domaine comme Ferran Centelles, de la Fondation El Bulli, Leagh Barkley (meilleur sommelier de Bordeaux en 2017), et le très coloré Paul Grieco, propriétaire et sommelier du restaurant new-yorkais Terroir.

« Quand les premiers billets ont été achetés par les gens de l’Islande, quatre personnes qui se déplaçaient spécialement pour l’événement, j’ai compris qu’on avait touché quelque chose et ça a déboulé, se souvient l’initiateur du projet. On a eu des gens du Mexique, des gens de Toronto, des gens de Vancouver. (…) Ce qui me surprend, c’est à quel point les gens se sont mis ensemble pour que ça arrive. »
Rien de surprenant là-dedans pour Élyse Lambert.
« Vincent est pour moi un visionnaire, un gars de talent, un passionné et quelqu’un qui nous permet comme sommeliers d’être exposés au reste du monde et qui permet aussi aux sommeliers du reste du monde de venir voir ce qui se passe à Montréal. »
« La sommellerie mondiale est ici, tout le monde regarde ce qui se passe, je trouve ça très, très excitant! »

ET LE MEILLEUR SOMMELIER DU MONDE EST…
Alors le prochain meilleur sommelier du globe sortira-t-il de Somm360? Peut-être pas le meilleur sommelier, selon François Chartier. « Il y a une sommelière roumaine (Iulia Scavo) qui a excellé dans les trois derniers concours de meilleur sommelier au monde. Je l’ai vu aller, elle a une chance incroyable. Il y a Pascaline Lepeltier qui est à New York mais qui est Française. Elle est devenue meilleur ouvrier de France avant d’être nommée meilleure sommelière de France un mois après. Dans ce dernier cas, c’était une première pour une femme. »
Et c’est sans compter nos deux Québécois Carl Villeneuve Lepage, de chez Toqué (meilleur sommelier du Canada en 2017) en plus de Pier-Alexis Soulière, de La Chronique, qui vient d’être sacré meilleur sommelier des Amériques.
Tout ce beau monde se retrouvera à la mi-mars à Anvers, en Belgique, pour l’ultime épreuve, le Concours du meilleur sommelier du monde. Et si le vainqueur a passé par le Vieux-Port, il en devra une au jeune entrepreneur qui a eu la vision de transformer un bête problème de chronométrage en tremplin vers les plus grands honneurs.