Équilibrer les risques
par Guy Bertrand
William « Bill » Easton a le vin dans le sang. Dès l’adolescence, dans la maison familiale de Sacramento, il est initié à la dégustation par ses parents qui, à l’occasion, lui offrent une coupe de rouge diluée dans un peu d’eau. L’eau va disparaître petit à petit, à mesure qu’il se dirige vers l’âge adulte. « Mes parents buvaient beaucoup de Zinfandel, se souvient-il. Ce sont eux qui m’ont fait découvrir ce type de vin. J’ai toujours aimé son goût épicé et le caractère du fruit. »
LES PREMIERS VINS
À sa sortie de l’université, Bill s’ouvre une petite boutique de vin dans la baie de San Francisco. Le goût lui vient rapidement de produire son propre jus, une aventure qu’il entreprend au milieu des années 80. N’ayant pas les moyens d’investir dans un vignoble, il loue un espace chez des amis vignerons pour y produire des vins atypiques de la région et de son époque. « Je devais faire vivre ma jeune famille. (…) L’idée de produire un Zinfandel m’est donc venue en cherchant un moyen d’équilibrer les risques, au cas où mes autres vins ne se vendent pas. »
« J’étais en train de fouler une cuve de Grenache, quand un fermier m’a apostrophé. Il m’offrait de lui acheter cinq tonnes de Zinfandel. Il avait gardé ces raisins pour son fils mais celui-ci n’ayant plus le temps de produire le vin, il était prêt à s’en départir. »
Le jeune vigneron va donc emprunter de l’argent, achète la production du fermier, et produit son premier Zinfandel. « Ce fut un grand succès! Par la suite, j’ai fondé mon vignoble (Terre Rouge). (…) À la fin des années 90, j’ai entrepris le projet d’Amador County qui visait à produire un vin plus abordable en terme de prix. »
LA RÉGION ET LES INCENDIES
Pour Bill Easton, la région d’Amador convient parfaitement à la production de Zinfandel. « Le climat est sec. Nous n’avons pas de problème avec le mildiou et, en plus, les pluies – environ 32 pouces par hiver – irriguent le vignoble naturellement.
Impossible de parler à un producteur californien sans évoquer les terribles feux qui sévissent dans la région. Une chance pour lui, son vignoble ne se trouve pas à proximité des principaux foyers d’incendie. « Le plus proche est à 100 miles d’ici. Nous n’avons pas trop de problèmes, non plus, avec la fumée qui demeure assez haute. Nous ferons quand même des tests sur quelques parties du vignoble pour nous assurer qu’il n’y a pas eu de contamination par la fumée. »
LE QUÉBEC
Bill a commencé à vendre ses vins au Québec pratiquement au même moment où il a fondé Terre Rouge. Le hasard a voulu qu’il fasse la rencontre de Jean-Philippe Lefebvre, de Rézin, au moment ou celui-ci démarrait son agence d’importation. « Je pouvais sentir que Jean-Philippe n’avait pas seulement de l’intérêt, mais une véritable passion pour le vin. Il avait, comme moi, étudié en œnologie alors nous avions beaucoup de choses en commun. Nous avons en quelque sorte grandi avec la compagnie (Rézin). »
Le vigneron californien vend environ 10% de la production de son Zinfandel d’Amador County au Québec. Pour lui, la province est cependant devenue plus qu’un simple marché.
« J’aime la cuisine, les gens. J’aime aussi cette façon de parler du vin au Québec. C’est une approche moins technique, plus poétique, plus portée sur le plaisir que procure le vin. »
Parlant de plaisir, Madame ma conjointe et moi aimons associer Zinfandel et grillades. Ce que nous avons fait avec ce Amador County 2014 avec beaucoup de plaisir, un plaisir partagé par Bill. « Oui, les viandes grillées vont très bien avec ce vin, mais je l’apprécie aussi avec une ratatouille, un plat classique de pâtes italiennes, où même avec de la pizza! »
UN VIN GLOU-GLOU
Ce Zinfandel est le seul vin d’Amador County vendu par Easton au Québec. Terre Rouge offre cependant quatre autres rouges à la SAQ, en plus d’un rosé. Le Californien nous annonce cependant l’arrivée imminente du Easton Zinfandel 2017 Lot 1852. « Le 1852 fait référence à l’année d’arrivée de cette variété de raisins en Californie, en provenance de la Croatie. C’est un genre de Glou-Glou wine, précise Bill, en faisant référence à un véritable vin de soif. C’est comme un Brouilly, un Beaujolais. La couleur est plus pâle, la goût est bien épicé, et on le boit frais à 10 °C. On n’en a pas produit une grande quantité mais je pense pouvoir en envoyer un peu chez-vous. »
Soyez donc vigilants, si cette nouvelle cuvée vous intéresse. Petite quantité est souvent synonyme de disparition rapide des tablettes quand le produit est de qualité.
Easton Amador County Zinfandel 2014
Code SAQ : 00897132
Degré d’alcool : 14,5%
Prix : 24,10$
Je ne prétends pas être un œnologue ou un expert de la chose vinicole. Je suis un amateur, passionné, mais amateur tout de même. Donc, dans cette chronique, je vous présenterai les vins que Madame ma conjointe et moi-même aurons apprécié – toujours dans une brochette de prix qui tourne autour des 20$ et disponibles à la SAQ – avec quelques notes sur les producteurs. Ne cherchez pas de cote d’appréciation. Si le vin est ici, c’est que nous l’avons aimé. Aussi simple que ça!