Après d’interminables mois d’un vaudeville absurde, soudainement les Alouettes semblent prêts à prendre leur envol. Sérieusement! Mais…
Par Guy Bertrand
Ils attendaient leur opportunité depuis de nombreuses années et ils l’ont maintenant. Mario Cecchini et Danny Maciocia ont officiellement pris les rênes des Alouettes en ce début de semaine et la nouvelle ne peut qu’être encourageante pour les amateurs.
Lors du point de presse confirmant leur arrivée dans le nid, les deux hommes ont démontré qu’ils étaient clairement habités de la même passion et que leurs priorités étaient à la bonne place.
D’abord au niveau des valeurs qu’ils défendent. Monsieur Cecchini les a identifiées au cours de ce point de presse : la transparence, le travail, la communication et le respect. Et son directeur général a soutenu ces valeurs de façon éloquente par la suite.
Oui, mais le coach?
Vous êtes amateur de football et vous savez donc que nommer un entraîneur-chef avant son patron n’a jamais été une bonne idée. Mais cette fois-ci, on peut penser que le duo Maciocia-Khari Jones deviendra l’exception à la règle.
D’abord l’entraîneur-chef a établi de solides bases dans les pires circonstances en 2019. Parachuté comme le leader de cette équipe six jours avant le début de la saison, Jones a fait du travail exceptionnel en menant les Alouettes aux séries avec une fiche de 10 victoires et huit défaites. Il est clairement apprécié de ses joueurs et des autres entraîneurs.
L’ancien patron des Carabins l’a reconnu sans équivoque:
« Je ne comprends pas qu’il n’ait pas obtenu le titre d’entraîneur-chef de l’année! (…) J’ai hâte de commencer (à travailler avec lui). Si les rôles avaient été inversés, j’aurais sans doute fait la même chose (lui donner un contrat de trois ans).
Danny Maciocia à propos de Khari Jones
Maciocia a aussi clairement établi qu’il ne jouerait pas dans les plate-bandes de son coach lorsqu’on lui a demandé s’il y aurait de la place pour Anthony Calvillo (présent à ce point de presse) au sein du personnel d’entraîneurs des Oiseaux. « Je l’ai déjà vécu comme entraîneur-chef. C’est l’entraîneur-chef qui doit choisir les assistants, pas un DG (…) Le choix des assistants lui appartient. »
Ces paroles ont certainement plu au principal intéressé qui ne part pas de zéro dans sa relation avec Maciocia. L’entraîneur-chef a assisté à des parties des Carabins depuis son arrivée à Montréal et il a rencontré son nouveau patron à quelques reprises. « Il n’est pas seulement un excellent homme de football, mais aussi une très bonne personne » a-t-il déclaré à Didier Orméjuste, de RDS.
Beaucoup de travail
Cette première journée de travail a commencé très tôt pour Danny Maciocia. « J’étais debout à deux heures et demi du matin… » a-t-il précisé lors du point de presse.
Il a aussi clairement établi ses priorités:
- Trouver un assistant DG
- Se pencher sur la marché des joueurs autonomes qui s’ouvre dans un mois
- Examiner la situation de l’équipe au niveau du plafond salarial
- Engager des dépisteurs aux États-Unis
- Préparer le repêchage
Une chance pour lui, après un séjour de neuf ans dans le milieu universitaire, le dernier dossier devrait quand même être assez aisé pour lui. On ne peut quand même pas s’empêcher d’écarquiller les yeux devant l’immensité de la tâche. La solution facile au premier problème serait sans doute de promouvoir l’actuel directeur des opérations football, Éric Deslauriers. Pour le reste, ce sera travail, travail et travail. La famille de Danny Maciocia ne le verra pas souvent au cours des prochains mois.
Le nouveau président
J’avais beaucoup de respect pour Patrick Boivin. L’ancien de Concordia était aussi dans une situation impossible lorsqu’il a obtenu la présidence des Alouettes. Il aurait sans doute mérité un meilleur sort. Cela dit, l’homme que les nouveaux proprios ont choisi arrive avec une feuille de route impeccable.
Très respecté dans le monde des médias, Mario Cecchini, a aussi quelques énormes défis devant lui. « Après ma famille, mes deux grandes passions sont les médias et le football » nous a-t-il appris lors du point de presse. C’est aussi un homme qui connait bien son milieu et qui a une énorme expérience du marché montréalais.
Son premier geste le démontre bien. Il a invité quatre fidèles détenteurs de billet de saison à assister au point de presse. Le message est clair. Les amateurs seront au cœur des priorités de toute l’équipe.
« La performance sur le terrain va toujours demeurer la priorité numéro un. Quand les fans sont heureux, ça veut dire que l’équipe va bien. et quand l’équipe va bien, les gens veulent s’y associer. »
Mario Cecchini, président des Alouettes
L’autre priorité du nouveau président est tout aussi importante, surtout pour les joueurs et l’ensemble de l’organisation: regrouper tout ce beau monde sous un même toit avec un terrain d’entraînement à proximité. Un objectif qu’on souhaite réaliser à l’intérieur de deux ans. Ça ne sera pas facile et, sourire en coin, le président a invité les gens à lui soumettre des suggestions. Ça ne peut pas nuire!
La communauté
L’arrivée des deux hommes lance aussi un message fort à la communauté montréalaise et aux amateurs de football de toute la province. L’équipe veut se rapprocher de son public.
« Notre relation avec la communauté est pour moi quelques chose très proche de mon cœur. »
Mario Cecchini, président des Alouettes
L’administration précédente avait annoncé son désir de s’impliquer dans le milieu du football amateur. Avec le duo Cecchini-Maciocia en place, on peut penser que le plan va passer à la vitesse supérieure.
D’ailleurs, le nouveau DG a dévoilé qu’il avait appelé tous les entraîneurs-chef des autres universités québécoises pour leur annoncer qu’il retournait aux Alouettes. Un geste important qui ne peut qu’inspirer confiance pour la suite des choses.
Maciocia va garder un lien avec les Carabins de l’Université de Montréal. « Je serai un Bleu toute ma vie » a-t-il fièrement déclaré. Et pas seulement en raison des succès savourés sur le terrain :
« 85 % de nos athlètes-étudiants ont gradué. C’est un pourcentage très élevé pas seulement au Québec, mais partout au Canada. Malheureusement, on n’en parle pas aux nouvelles. »
Dany Maciocia, directeur général des Alouettes
La patience
Ce point de presse a été mon premier contact (virtuel, je n’y étais pas) avec un des deux nouveau propriétaires de l’équipe, Gary Stern.
Le monsieur a bien fait les choses en amorçant son discours avec quelques mots de français. Il a rapidement laissé la place à ses deux nouveaux employés, mais on ne peut pas dire qu’il s’est effacé. À de nombreuses occasions, on l’a entendu répéter son ambition de voir les Alouettes conquérir la Coupe Grey dès l’automne prochain. Un journaliste lui a d’ailleurs demandé s’il ne valait pas mieux apprendre à marcher avant de courir, comme le veut le dicton. La réplique de monsieur Stern était prête.
« Nous avons appris à marcher la saison dernière. Nous avons remporté dix victoires contre huit défaites! »
Gary Stern, co-propriétaire des Alouettes
Le nouveau patron semble aimer rigoler mais son insistance à parler de la Coupe Grey tout de suite à des allures quelque peu Jerry Jonesques (si je peux me permettre). Il dit vouloir être effacé, mais le sera-t-il vraiment? Aura-t-il la patience d’attendre les résultats? Là est toute la question…
Et si lui n’est pas patient, est ce que son copropriétaire arrivera à le contenir? D’ailleurs, où est-il ce Sid Spiegel? Le verra-t-on prochainement?
Ceci dit, dans la Ligue canadienne de football, tout est possible. Oui, aller chercher un championnat en 2020 est réalisable, mais est-ce réaliste? Dany Maciocia sait déjà qu’il doit reconstruire une ligne défensive dont le leader, John Bowman, a 37 ans. Il doit aussi trouver un remplaçant au porteur de ballon William Stanback, parti dans la NFL.
Le défi est gigantesque, mais pour moi, ça ne fait pas de doute: Mario Cecchini et Dany Maciocia sont d’excellents candidats pour relancer cette franchise. Si les proprios les laissent travailler en paix, il est clair que les deux nouveaux-venus donneront tout pour atteindre leurs objectifs le plus rapidement possible. Ça ne donnera peut-être pas un championnat en 2020, mais l’avenir apparaît soudainement bien prometteur.