Pour la durée du Tour de France, l’ancien coureur québécois François Parisien qui est aussi analyste à RDS, a accepté de nous livrer ses impressions à chaud, à l’issue de chaque étape.
Le Tour de France vu par un Parisien… – Étape 6
Par Guy Bertrand
Montréal – L’Alpe d’Huez bretonne. C’est ainsi qu’est surnommé le Mûr-de-Bretagne, la côte de deux kilomètres à 6,9%, que les participants du Tour de France devaient affronter deux fois en conclusion de cette sixième étape. Alejandro Valverde (Movistar) et Julian Alaphilippe (Quick Step) étaient donnés favoris au départ.
On a eu une échappée dès le premier kilomètre avec Laurent Pichon (Fortuneo), Anthony Turgis (Cofidis), Dion Smith (Wanty-Gobert) et encore une fois deux coureurs de la Direct Énergie, Damien Gaudin de même que Fabien Grellier. Smith en a profité pour aller chercher les premiers points de montagne en atteignant le premier les sommets des côtes de Ploudiry et Roc’h Trévézel, mais l’échappée a été rattrapée à 16 km de l’arrivée, ce qui a permis à Toms Skujins (Trek) de conserver le maillot à pois en enlevant la première montée du Mûr-de-Bretagne.
L’Irlandais Dan Martin (UAE) s’est échappé avec 1,2 km à faire pour mériter la victoire de justesse devant Pierre Latour (AG2R) et Valverde. Le Belge Greg Van Avermaet conserve le maillot jaune.
Guy Bertrand : François, on attendait beaucoup de cette étape. Es-tu déçu de ce que tu as vu?
François Parisien : Oui, quand même un peu. Je m’attendais à plus de batailles dans les 15 derniers kilomètres. Depuis le début du tour, c’est souvent ça, une course d’attente jusqu’au dernier moment. C’est un peu la configuration de course que les coureurs ont choisie, on est patient, on essaie de dépenser le moins d’énergie possible jusqu’au dernier instant. Les gars donnent quand même tout ce qu’ils ont à la fin et ça a quand même été intéressant dans le dernier secteur.
G.B : Un mot sur le vainqueur d’étape, Dan Martin.
F.P : Dan est un ami. En 2013, lorsque j’ai enlevé une étape du Tour de Catalogne, il avait terminé au premier rang du classement général. Je suis vraiment content pour lui. Lors de la diffusion à RDS, le directeur sportif de l’équipe, Philippe Mauduit, nous avait laissé entendre qu’il allait peut-être attaquer. Il était au-dessus du lot aujourd’hui.
G.B : Deux malchances à l’intérieur des six derniers kilomètres. Commençons par Tom Dumoulin (Sunweb) qui a été victime d’une crevaison et qui a perdu 53 secondes.
F.P : C’est dommage de voir des coureurs perdre du temps au classement général pour des bris mécaniques ou des chutes. Je prêche pour que l’UCI révise la règle du trois kilomètres pour la ramener à cinq, six ou même à dix, et permettre ainsi à ces malchanceux de terminer dans le même temps que le vainqueur.
Tom Dumoulin, c’est aussi un ami, alors ça me fait encore plus mal au cœur.
G.B : Romain Bardet (AG2R) a dû changer de vélo quelques instants plus tard et lui a perdu 31 secondes.
F.P : Au lieu d’attendre la voiture d’équipe pour changer de vélo, Tony Gallopin a tout de suite donné le sien à Bardet ce qui fait que le changement s’est fait très rapidement. Je pense qu’il (Bardet) a mis moins de 500 mètres pour revenir dans le peloton. C’était donc très surprenant de le voir concéder du temps au général. L’incident lui a peut-être fait perdre beaucoup d’énergie et un peu de son sang-froid.
G.B : On a vu les Quick Step se lancer à l’attaque dans la montée de Roc’h Trévézel. Ont-ils laissé trop d’énergie dans cet effort ?
F.P : Alaphilippe et Philippe Gilbert n’ont dépensé aucune énergie aujourd’hui, ce sont les coéquipiers qui l’ont fait. On peut au moins dire que la Quick Step aura essayé quelque chose. Alaphilippe finit quand même dans le top 5, ce n’est quand même pas si mauvais. Il espérait sans doute la victoire, mais il faut relativiser quand même. Une 4e place au Tour de France, c’est exceptionnel! Mais, la question se pose : Les Quick Step ont-ils dépensé trop d’énergie aujourd’hui? Auront-ils assez de ressources pour aider Fernando Gaviria à remporter l’étape de demain au sprint? On ne peut pas se donner de cette façon-là à chacune des étapes parce qu’on va éventuellement en payer le prix.
G.B : Chez Sky, Geraint Thomas prend la deuxième place au général et Chris Froome perd encore 5 secondes. Comment analyses-tu cette situation.
F.P : Et puis, Thomas va chercher deux autres secondes au point bonus. Je le dis depuis le départ, pour moi, le vrai leader est Geraint Thomas. Je le vois en très grande forme. Je suis persuadé que la Sky l’a préparé pour assumer ce rôle en raison de la controverse qui entourait Froome avant le début du tour. Je trouve que le Froome que l’on voit présentement est bien en deçà de que l’on a vu lors des dernières éditions du Tour.
G.B : Demain, septième étape de 231 km entre Fougères et Chartres sur le plat. On va revoir les purs sprinteurs. Que prévois-tu ?
F.P : C’est la plus longue étape du Tour. Je vais y aller pour Arnaud Demare (Groupama-FDJ) ou André Greipel (Lotto-Soudal), mais c’est seulement parce que j’essaie de me forcer pour ne pas toujours choisir Gaviria ou Peter Sagan (rires).
François Parisien est analyste du Tour de France à RDS. Coureur retraité depuis bientôt cinq ans, François a connu une belle carrière qui l’a notamment vu remporter le Championnat canadien sur route en 2005 et une étape du Tour de Catalogne, en 2013. Il est le premier cycliste québécois à avoir remporté une épreuve du UCI World Tour.
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